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Debohra Saba est usagère de la maison de naissance PHAM de Bourgoin Jallieu (38) et Présidente du Collectif des Maisons de Naissance françaises
Quels sont les objectifs du Collectif des maisons de naissance ?
Le Collectif des Maisons de Naissance Françaises existe de façon informelle depuis 2016. Il vient récemment de se constituer en association dans le but de représenter les 8 maisons de naissances existantes actuellement, mais également d’accompagner les futurs projets. Sa mission est de communiquer sur les maisons de naissance au nom des acteurs qui leur permettent d’exister. Le Collectif se veut l’interlocuteur privilégié des discussions ou débats qui peuvent aussi bien animer la sphère populaire que politique au sujet de cette alternative à la naissance.
Au sein de l’association, nous avons tenu à respecter une parfaite parité entre sages-femmes et usagers. Cela nous semble essentiel pour représenter au mieux les intérêts et les préoccupations de chacun. Cet engagement des parents est également un message politique fort, puisqu’il incarne à lui-même la nécessité de ce type de structure.
En France, les maisons de naissance font face à de nombreuses critiques : à la veille de leur expérimentation, la sécurité de la prise en charge était questionnée. Aujourd’hui, c’est leur coût qui est remis en question. Comment réagissez-vous à ces attaques ?
Ce ne sont pas tant des attaques ciblées que de la méconnaissance. C’est normal qu’il soit difficile d’imaginer et de construire un système différent. Au bout de cinq ans d’expérimentation, nous constatons que beaucoup de préjugés ont été évacués grâce aux résultats qu’ont apportés les maisons de naissance, aux études sur le terrain, et puis juste à leur présence dans notre paysage français.
Je pense que cette question du coût est intéressante et qu’elle mérite qu’on s’y attarde. Il est important que les sages-femmes soient rémunérées à la hauteur de leur compétences et responsabilités, mais également que cette offre de soin soit accessible à tous les couples qui le désirent. Il me semble important que ces acteurs soient pleinement entendus dans ces débats de financement.
Quant au coût de fonctionnement global, je ne peux avoir qu’un avis de non experte sur la question, mais bien évidemment, comme beaucoup d’autres parents, je rêve d’un système de soin où plus de moyens serait mis au service de la naissance, du post-partum, de la femme… que ce soit en maison de naissance ou en milieu hospitalier.
Selon vous, quels sont les bénéfices d’un suivi en maison de naissance ?
Le suivi en maison de naissance est très individualisé, il a beaucoup de sens dans cette période particulièrement sensible de la vie d’une femme. L’accompagnement global qui y est pratiqué consiste à être suivie par la même sage-femme ou le même binôme, de la grossesse au post partum en passant par l’accouchement. Cela va bien plus loin qu’un suivi médical : c’est une prise en charge générale du couple à tous les aspects (physique, affective, psychologique). Ce qui va émerger de ce suivi c’est la confiance, en sa sage-femme tout d’abord, puis en soi. Cette confiance va pouvoir être expérimentée au moment de la naissance, où on sait que les femmes ont autant besoin de sécurité affective que médicale. C’est donc une expérience tout à fait bénéfique pour les femmes.
Mais cet accompagnement va également donner une place particulière au père, qui va devoir s’impliquer plus et être plus acteur. Pour un accouchement physiologique en maison de naissance le partenaire n’est pas qu’un accompagnant, c’est un membre à part entière de l’équipe parentale avant même que l’enfant soit né. Je suis convaincue que ce type de prise en charge est très pertinente pour les pères ou co-parents qui se sentent très souvent exclus, passif, inutile dans cette grande aventure. D’autre part comme le retour à la maison se fait de façon anticipée, les pères ou co-parents vont avoir un véritable rôle à jouer les premières heures et vie de leur enfant. Cela ne peut que favoriser la relation avec l’enfant.
La confiance acquise pendant la grossesse et l’accouchement va se révéler utile pour la mère dès ces premiers jours à domicile. Elle va évidemment positivement nourrir le lien mère enfant.
D’autre part je pense que la qualité de suivi et de la relation tissée va favoriser le dialogue en suite de couches, ce qui peut permettre de détecter un mal-être, voire une dépression s’installer.
Pensez-vous que l’existence des maisons de naissance pourrait avoir un impact positif sur la prise en charge au sein des maternités ?
Je suis convaincue que la présence des maisons de naissance ne peut qu’enrichir le paysage médical français. Nous avons tout à gagner à diversifier les prises en charge. En premier lieu pour les femmes, qui ne pourrons avoir la liberté de mettre au monde leurs enfants comme elles le désirent qu’en ayant un éventail de plusieurs choix. Et en second lieu, pour les maternités qui vont pouvoir s’enrichir de pratiques nouvelles apportées par les maisons de naissance, et ainsi être au plus près des désirs des femmes qu’elles accompagnent.
La maison de naissance ne doit en aucun cas devenir le modèle unique, elle doit exister pour être un choix. Un choix qui rappelle aux femmes qu’elles sont actrices de ce moment unique de leur vie. Peut-être que les maisons de naissance vont inspirer les femmes, y compris celles qui ne souhaitent pas y accoucher. Peut-être que ce suivi qui semble si privilégié va donner envie à toutes les femmes d’y avoir accès peu importe la structure, permettant ainsi petit à petit, d’améliorer toutes les formes de prises en charge.
Combien de projets de maisons de naissance avez-vous pu référencer à ce jour ?
Le collectif a connaissance d’une quarantaine de projets en cours d’élaboration. Tous ne sont pas au stade d’avancement, mais cet engouement témoigne d’une demande importante aussi bien des sages-femmes à exercer de cette façon que des parents à être suivis en maison de naissance. Le collectif accompagne les projets dont l’offre assure l’autonomie pleine et entière des sages-femmes. Nous espérons qu’ils seront nombreux à voir le jour.