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Nous avons assez peu d’écrits témoignant de l’histoire de la profession de sage-femme jusqu’à l’époque moderne, voire jusqu’à nos jours.
Pourtant, on trouve dès le néolithique des représentations qui nous renseignent sur l’importance de cette profession exclusivement féminine. Celle-ci est la plupart du temps placée devant (obstetris) la parturiente ce qui a donné plus tard le terme d’obstétrique. La sage-femme est celle qui donne la sagesse aux femmes, qui les aide à devenir mère.
Sage-femme ou matrone ?
La matrone a longtemps été présente aux côtés des femmes dans les campagnes. Elle était choisie par la communauté en fonction de la confiance qu’elle inspirait. La matrone ne bénéficiait pas de formation. Au mieux, elle possédait une connaissance empirique grâce à sa propre expérience.
Lorsque l’Etat s’engage dans une politique d’accroissement de la population, les matrones seront mises à l’index en raison de leurs pratiques désastreuses pour la vie des parturientes et des nouveau-nés.
A contrario, les sages-femmes étaient formées dans les grandes villes. Au XVIII siècle, une sage-femme invente une très ingénieuse « machine » pédagogique : Mme Angélique Du Coudray crée un mannequin et se déplace dans les provinces afin de diffuser auprès des sages-femmes les différentes techniques de manœuvres obstétricales.
Au XXème siècle, une succession de révolutions sociales et de progrès scientifiques va changer considérablement la maternité des femmes et bouleverser la profession de sage-femme. En quelques années, une très grande majorité de sages-femmes va passer d’un exercice libéral au domicile des patientes à un exercice salarié dans les maternités.
En effet, au début du XXème siècle, les hôpitaux sont destinés aux femmes les plus pauvres qui ne pouvaient accoucher chez elles. Or, les conditions d’hygiène dans les chambres communes des hospices et des hôpitaux sont déplorables. La mortalité maternelle et infantile est importante en raison, notamment, de la fièvre puerpérale. Les pouvoirs publics se préoccupent du taux de la natalité et l’accouchement devient une affaire de santé publique.
Après la seconde guerre mondiale, grâce aux mesures de prophylaxie, à la création de la sécurité sociale et à l’extension des allocations familiales, les femmes sont incitées à accoucher dans les maternités. Le mode d’exercice des sages-femmes devient majoritairement salarié et les syndicats de défense des intérêts salariés émergent. Le statut de la sage-femme hospitalière de la fonction publique est créé par les décrets de 1989.
En 1984, La formation s’ouvre aux hommes, qui restent toutefois très minoritaires et représentent moins de 2% des sages-femmes actives.
Les techniques scientifiques et médicales progressent spectaculairement dans le dernier quart du XXème siècle. Diagnostic anténatal, monitoring, échographie, marqueurs sériques, suivi de grossesse et accouchement deviennent des actes techniques. S’ajoute l’arrivée en salle de naissance du médecin anesthésiste avec la pratique courante de la péridurale.
Les sages-femmes gagnent en technicité mais perdent en autonomie. Les décrets de 1998 dits de périnatalité définissent les normes en matière de personnel et de locaux.
Petit à petit, les protocoles s’installent pour rationaliser le temps et les prises en charge. Même si les derniers plans de périnatalité évoquent largement cette question, les conditions de suivi et de la surveillance de la grossesse, de l’accouchement et du suivi post natal accentuent la surmédicalisation.
Aujourd’hui, 99% des accouchements ont lieu à l’hôpital et 75 % sous péridurale. Pourtant, 1 femme sur 4 n’est pas satisfaite de ces conditions et se sent dépossédée de son accouchement. Mais la logique sécuritaire peut-elle être compatible avec l’éthique ?
Les sages-femmes manifestent contre cette déshumanisation, contre l’idée de rentabilité et d’efficacité au détriment de l’affect, de l’émotion et parfois même de la bientraitance.
C’est ce constat et le souhait des patientes de pouvoir mettre au monde leur enfant de manière naturelle qui a abouti, aujourd’hui, à l’expérimentation des maisons de naissance.
Parallèlement, la profession – grâce à l’extension de ses compétences – joue un rôle de plus en plus actif auprès des femmes, pour leur santé génésique. Elles peuvent ainsi assurer le suivi gynécologique de toutes les femmes en bonne santé et leur prescrire une contraception. Cet engagement en faveur de la santé des femmes – mais aussi de leurs droits et de leur choix – s’est également traduit par la possibilité pour les sages-femmes de prescrire des IVG médicamenteuses.
Au cours des dernières décennies, les sages-femmes françaises ne se sont pas résignées à devenir les auxiliaires des obstétriciens. Grâce à leurs combats pour leur statut ou pour leurs compétences, elles ont à cœur de rester toujours au plus près de la santé des femmes.